Le problème quand on était étourdi comme Gabriel, c'est que l'on pouvait parfois faire quelques bêtises. La dernière en date, c'était une chute en vélo, parce qu'il n'avait pas vu le panneau annonçant des travaux. Une belle gamelle, qui lui valait des blessures importantes mais heureusement pas très graves. Ca faisait juste sacrément mal. Dès qu'il mettait un pantalon sur ses genoux en sang ou sur ses bras, il souffrait pas mal. La pharmacienne de son quartier lui avait donné un baume apaisant, pour hydrater et soulager un peu la douleur. Ca faisait effet mais en douceur. Elle y était habitué, la jeune femme, à le voir rappliquer pour des bobos divers et variés. Se prendre une porte vitrée parce qu'il ne l'avait pas vue fermée : checked. Se prendre un lampadaire et s'éclater le nez : checked. S'emmêler les pieds dans un fil ou un pied de table : checked. Il avait même pris un pigeon en pleine tête, quelques semaines plus tôt. Clairement, si en plus la malchance s'y mettait, il n'avait vraiment aucune chance ! Par chance pour lui, il tombait généralement sur des gens bienveillants qui l'aidaient à se relever et s'assuraient qu'il aille bien. Il se disait pourtant qu'il ferait attention, et il faisait plein d'efforts en ce sens. Hélas, à chaque fois, il suffisait d'une demi-seconde d'inattention, parce que son esprit était capté par quelque chose d'autre : une personne, un son, une odeur... et paf, l'accident survenait ! Pour garder une contenance, il se disait que ça pourrait être pire. Il aurait pu finir handicapé ou même y rester ! Dans le torrent de tuiles qui animait son quotidien, il s'en sortait bien !

Aujourd'hui, quelque chose aurait du lui mettre la puce à l'oreille. Tout se passait beaucoup trop bien. Lily avait été particulièrement contente de le voir gérer l'atelier dessin avec les petits. Et aucun de leurs jeunes élèves n'eut de mésaventures. A la cafétéria, il ne renversa rien et ne se tâcha même pas ! Pourtant, la présence de spaghettis bolognaise le fit un peu flipper. Il fut lui même surpris de ne pas avoir provoqué de catastrophe, parce qu'il sentait bien que ses collègues attendaient un peu ça comme un évènement majeur habituel, une routine ! L'après-midi fut agréable, outre la sieste, il aida à préparer le cours du lendemain. Mine de rien, il dépannait beaucoup Lily, d'abord parce qu'il était volontaire et enthousiaste et puis aussi parce qu'il savait y faire avec les petits. Il avait ça dans le sang, la pédagogie. A la fin de sa journée, il rassembla ses affaires et comprit alors que le calme était trop beau pour être vrai... Son carnet !!! Où était-il ? Pris d'un vent de panique, il déballa tout son sac, dans l'espoir de l'y trouver, en vain. Il devait l'avoir perdu ! Voilà le drame ! Il notait sur ce carnet tout ce qui lui passait par la tête, à commencer par le nom des gens qu'il avait rencontré et pour lesquels il dessinait le visage, pour mieux s'en rappeler. Avec sa difficulté à mémoriser la tête des gens, il préférait ne pas prendre de risques. Sauf qu'il n'y avait pas que ça dans son "journal", il y mettait ses états d'âmes, ses confidences... Et si quelqu'un tombait dessus, il risquait de découvrir ses secrets... tous ses secrets... dont un qui potentiellement pourrait ruiner la vie d'autres personnes.

Il s'élança dans le couloir pour rejoindre la caféteria, dans l'espoir que l'objet l'y attende bien sagement. Manque de bol, il n'y trouva rien... Son coeur battait à tout rompre. L'école n'était pas très grande, mais autant chercher une aiguille dans une meule de foin, sans possibilité de la faire brûler ! Il reprit sa course dans les couloirs pour se diriger vers les toilettes. Il n'y avait que là, qu'il pouvait le trouver... il l'espérait de toute son âme ! Au tournant d'un couloir, il s'écrasa contre une personne qui arrivait dans l'autre sens. Le choc lui coupa le souffle et il tomba le cul par terre, face à... Nick... exactement la personne sur laquelle il espérait ne pas tomber... Ayant du mal à reprendre son souffle, il se releva tant bien que mal et lui dit essoufflé :

- Nick... tu m'as... fait peur... je... euh... j'ai perdu mon j... je veux dire j'ai égaré... quelque chose... et j'en ai besoin... je peux pas trop discuter... il faut que je le retrouve...

Il ne fit pas de lien entre ce que Nick tenait entre ses mains et l'air fermé qu'il affichait... pour lui, son frère était simplement agacé de s'être fait bousculer. Il allait reprendre son chemin, loin de se douter qu'il allait pas passer un bon quart d'heure...

Avec la naissance de leur fille à venir la fin de l’année scolaire était autant une bénédiction d’avoir plus de temps à accorder à Aylin et leur bébé, mais aussi un stress de plus, parce que après tout, ça voulait aussi dire que la naissance sera beaucoup plus rapproché qu’il ne voulait bien se l’admettre et ce, même si Ryan et Amalie ne cessait de lui dire que tout irait bien. Avec les tests à passer à ses élèves pour leur bulletin et les réunions de fin d’année, il essayait de se tenir occuper pour ne pas trop réfléchir. Tout n’avait pas été rose au mariage de ses amis, mais au moins les choses semblaient vouloir aller dans le bon sens. Après tout, il n’avait rien fait de mal, et encore moins quand on pensait qu’il avait discuté avec Clara, d’Aylin. Nick avait eu une grosse semaine, et il avait promis à ses petits monstres d’emmener Bruno à la fin de la semaine pour qu’ils puissent le voir et jouer avec lui, seulement SI ils travaillaient tous très fort. Les autres professeurs devaient vraiment se demander pourquoi autant de petits bouts faisaient des efforts considérables dans leurs études, examens et travaux cette semaine. Avant toute cette histoire, sans doute qu’il l’aurait emmené quand même, mais maintenant Monsieur Bruno ne passait pas ses journées tout seul, donc autant qu’il pouvait aimer se faire tirer les oreilles par des minis humains, autant, rester avec Aylin à se faire dorloter lui allait aussi grandement. Il était carrément trop gâté.

Il venait à peine de finir de débarrasser son cabaret quand le concierge vint vers lui. Nick le salua mais ce dernier ne passa pas tout droit et s’arrêta à sa hauteur. Lui tendant un carnet qu’il avait déjà vu, mais qui n’était clairement pas le sien.

- Nick ! Justement ! Le carnet, il y a ton nom dedans à quelques places que j’ai vu juste en tournant les pages… C’est le tiens ?

Nick le prit et le reconnut tout de suite, c’était celui de Gabriel, mais pourquoi son nom se trouvait dedans ? Il sourit à l’homme qui n’avait pas encore quitté, mais garda le carnet, il pourrait sûrement tomber sur Gabi quelque part dans l’école et lui redonner. Et lui demander pourquoi son nom se trouvait à l’intérieur.

- C’est celui de Gabi ! Je le vois tous les jours, je vais lui remettre merci !

Il se leva et marchant dans les couloirs pour retourner au gym , il fini par tomber sur un groupe d'étudiants qui avait besoin d’aide pour attacher leur soulier, déposant ses choses par terre, il les aida. Quand il se retourna, il vit un jeune avec le carnet de son ami dans les mains, ouvert, il passait de page en page en faisant semblant de comprendre ce qu’il y voyait. Jetant rapidement un œil sur la page ou il était rendu, il se demanda comment Gabi lui-même pouvait comprendre ce qu’il avait écrit tant son écriture ressemblait à des pattes de mouches. Toutefois, en un seul regard, son œil se posant immédiatement sur son nom à lui. Il était donc vrai qu’il parlait de lui. La curiosité s’empara de lui à savoir pourquoi il figurait dans le carnet qui ne quittait jamais Gabriel habituellement. Il cessa de percevoir les bruits alentour de lui quand il lu des phrases qu’il essayait tant bien que mal de comprendre. La première qu’il pu réussir à lire sans se faire déranger, le dérangeait lui dans son fort intérieur. “Je ne sais pas comment dire la vérité à Nick et Isaac. Ce que je ressens est si fort.” Il entendit les cloches pour les cours résonner ce qui l’empêcha de continuer sa lecture. Il referma le carnet dans un clac sonore et se releva. Plus il marchait, plus il réfléchissait, plus il se fâchait de ne pas avoir compris que son amitié était à sens unique. Que Aylin avait peut-être eu raison de penser que Gabriel crushait sur lui, et à la phrase qu’il avait lu, sur son frère aussi. Est-ce qu’il avait vu Isaac à la télévision et crushait déjà sur lui avant même de savoir qu’il était son frère ? Est-ce que leur amitié était réelle ou bien s' il ne l’avait approché que pour essayer de les draguer tous les deux. Plus il réfléchissait et plus il se repliait sur lui-même. Il allait flancher et lire tout le contenu de ce fichu carnet, il avait le droit de savoir ce qui se passait, surtout s' il ne pouvait pas s’assurer de la sécurité de son petit frère. Au loin dans le corridor, tout d’un coup il vit Gabi. Il poussa un soupire, il ne voulait pas nécessairement que ce dernier voit qu’il avait le carnet, mais il aurait bien aimé aussi pouvoir confronter le jeune homme et comprendre ce qu’il venait de lire, comprendre ses derniers mois. Comme à son habitude le jeune homme était encore la tête dans les nuages, mais pour une fois, il n’était pas le seul, puisque Nick n’avait pas calculer comme il faut la distance qui les séparait, il le comprit uniquement quand Gabi fonça dans son torse et tomba à la renverse. En temps normal, il aurait sans doute rigoler de cette situation dans laquelle Gabi semblait toujours en train de se mettre, mais là il jonglait encore entre l’idée de fuir dans son bureau lire le contenu du carnet et lui remettre en lui expliquant qu’il le voyait comme un ami et pas du tout comme un amoureux potentiel il savait bien que parfois il se montrait très amical, mais il ne pensait pas lui avoir fait croire qu’ils pourraient être plus que des amis tout les deux. Et si on ajoutait Iz dans cette histoire, il ne disait même pas !

Il finit toutefois par lever le carnet pour le montrer à Gabi, voyant ses yeux s’illuminer. Il poussa un soupir et le regarda droit dans les yeux.

- Je crois qu’on devrait parler toi et moi … Suis moi.

Et sans même lui remettre son carnet, ou se retourner pour s’assurer que Gabi le suivait, il se dirigea dans son bureau.

Sonné, c'était le mot. Il fallut un peu de temps à Gabriel pour reprendre ses esprits, dans la mesure où il venait de se prendre un plaquage de la part de Nick. Alors qu'il s'apprêtait à partir pour retrouver son carnet, il eut le droit à des montagnes russes émotionnelles. Et ce fut d'ailleurs gratuit. Il était important de le souligner tant le monde actuel était mercantile. Sur le coup, il fut content de voir Nick lever le carnet et le lui mettre sous le nez. Au moins quelqu’un l’avait retrouvé et cela lui épargnait de devoir fouiller l'école comme un forcené ! Il espérait, dans une pensée fugace, qu’il ne l’avait pas lu mais il eut bientôt la réponse à sa crainte. Contrairement à d'habitude, son frère paraissait plus fermé, plus tendu aussi... Il fuyait son regard alors que d'habitude il le couvait d'un air taquin et espiègle, à l'affût d'une bêtise ou d'une gaffe. Il fallait le dire, là-dessus, il en avait toujours pour son comptant ! On ne pouvait pas faire plus maladroit et plus comique que le jeune assistant Moore. Quand Nick lui intima de le suivre et qu'il se tourna pour marcher vers son bureau, Gabriel sentit la vie le quitter. Un frisson d’effroi lui parcourut l’échine… il aurait voulu s’enfuir à toutes jambes, partir se terrer dans une grotte du Montana pour être sûr de ne pas être retrouvé. Nick ne plaisantait pas... et s'il cherchait à s'isoler, c'était probablement pour lui faire passer un sale quart d'heure...

Il avala difficilement sa salive, sentant sa gorge râper contre elle-même, dans une douleur peu agréable. Il était désormais tout pâle. Il suivit mécaniquement Nick dans son bureau en baissant la tête. On aurait dit un enfant que l’on prend sur le fait. Il ressemblait à un condamné à mort marchant dans le dernier couloir de sa vie. Qu’allait-il se passer maintenant ? Nick referma la porte du bureau et Gabriel manifesta des signes de nervosité évidents. Il gigotait, il fixait ses baskets, en se rongeant les ongles… il tremblait. Dans sa tête, il se demandait quelle attitude adopter. Ok, il aurait sûrement du lui dire la vérité plus tôt et ne pas chercher à la cacher. Mais il avait tellement peur d'être rejeté, sans avoir la moindre chance de leur montrer qui il était vraiment. Avant même que Nick ne puisse dire un mot, il craqua, en partant dans tous les sens :

- S’il te plaît, Nick… je peux tout t’expliquer… je t’apprécie vraiment beaucoup… et j’aime bien Isaac aussi… je tiens à notre amitié… c’est pour ca que je n’ai rien dit…

Il regarda le journal et tenta de capter le regard de Nick. Il n'aimait pas du tout ce qui était en train de se passer, parce qu'il ne maîtrisait plus rien. En même temps, avait-il déjà contrôlé quoi que ce soit, Gabi ? Il était une catastrophe ambulante, capable de faire les pires bourdes... la preuve... en direct :

- Je te promets que je voulais te dire la vérité... mais je ne savais pas comment m'y prendre... je n'ai jamais fait ça avant, tu comprends ? Et... je... ne voulais pas que tu me rejettes... parce que... je tiens à toi... Nick... je voulais pas que tu l'apprennes comme ça... je suis désolé...

Il fit une moue d'enfant battu, alors qu'il était au bord des larmes. D'un côté, il se sentait soulagé que Nick connaisse enfin la vérité, enfin ce qu'il croyait être la réalité, loin de se douter du quiproquo dans lequel il s'était embarqué. Il eut un sourire attristé et ajouta, visiblement malheureux :

- Est-ce que... on peut au moins... rester amis ?

Depuis que Gabi était arrivé en ville j’avais cru trouver un bon ami en lui, même mon frère semblait l’apprécier et je trouvais cela bien plaisant, j’étais heureux qu’il soit devenu un ami que je pouvais considérer comme proche, moi qui en avait pas beaucoup quand il est entrer dans ma vie. Bien entendu, maintenant mes meilleurs amis je pouvais déjà dire que c’était Connor, Ryan et Gabi. Toutefois, avec ce que je venais de lire je ne savais plus trop quoi faire. Je n’avais jamais été attiré par les hommes dans ma vie, je ne m’étais pas du tout posé la question non plus à un seul moment de ma vie. Il ne m’était toutefois pas arrivé non plus qu’une personne soit amoureuse de moi, encore moins un que je considérait comme un de mes meilleurs amis. En plus, comment ce petit bonhomme pouvait craquer sur lui, mais aussi sur son frère en même temps ? Ils étaient tellement différents Iz et lui. Les élèves les saluaient encore quand il referma la porte avec un sourire qu’il perdu en se retournant vers Gabriel. Comment allait-il gérer la situation? Il se posait encore la question. Nick eu simplement le temps de s'asseoir avant que Gabi ne parte avec sa diarrhée verbale comme lui seul pouvait faire dans son entourage. Il semblait nerveux, aussi, Nick le laissa faire, sachant bien que tant qu'il n'aurait pas terminé de parler, il ne serait pas apte à écouter ce que lui avait à lui dire, et puis, ça lui donnait le temps de réfléchir à ce qu’il allait lui dire.

Plus Gabi parlait et plus l’idée qu’il était intéressé, sentimentalement, par lui se confortait, ainsi, il avait eu à lire une simple phrase pour que son amitié se complique autant. Quand les femmes qui réussisait à le revoir plus d’une fois en arrivait aux sentiments il finissaient toujours par couper les ponts complètement, allant vers une autre femme, briser des coeurs ne le dérangeait en aucun cas. Pourtant, autant qu’il appréciait Gabi, autant se dernier devrait savoir qu’il était amoureux, mais d’Aylin, pas de lui. En même temps, il ne lui aurait sans doute jamais dit, s' il n’avait pas laissé tomber son carnet et qu’on lui avait rapporté à lui en précisant que son nom y était inscrit. À présent, il était sûr de ne pas vouloir lire la suite de ce carnet, lui parler ferait l’affaire, même s' il ne savait pas comment gérer la situation. Gabi termina son speech en lui demandant de rester ami, Nick prit donc la peine de garder le silence quelques secondes pour penser à ce qu’il voulait au final de leur relation.

- Écoute Gabriel, je sais que tu voulais sans doute pas le cacher, et honnêtement je ne voulais pas lire ton carnet, le concierge pensait que c’était le mien parce qu’il avait vu mon nom à l’intérieur.

Il prit une petite pause, son collègue ne semblant pas fâcher qu’il ait lu, il semblait plus stressé que leur amitié puisse être compromise.

- Honnêtement, ça ne m'est jamais arrivé qu’un de mes amis s’intéresse à moi comme ça, je tiens à toi, mais pas de la même façon que tu pourrais tenir à moi. Tu sais, j’ai Aylin et ma petite Aurora.. je sais qu’en fait tu voulais pas me le dire, mais Iz non plus n’aime pas les garçons tu sais, je veux pas que tu te ramasses avec un cœur brisé en essayant de rester amis avec nous, si c’est au dessus de tes forces.

Nick se dit qu’il aurait aimé avoir quelques minutes pour appeler Aylin, qu’elle l’aide pour le guider dans les paroles qu’il venait de prononcer, tiens il aurait même pu appeler Amalie, elle, elle aurait pu lui sortir un texte pour ne pas blesser Gabi, mais aussi pour qu’il se fasse comprendre sans qu’il y ait de malentendu.

- Est-ce que tu te sens capable de rester ami avec nous ? Est-ce que tu aimerais mieux prendre quelque temps pour penser, ou effacer les sentiments pour nous ? Je te considère comme un ami, et j’aime pas voir souffrir mes amis.

Gabriel ne savait pas trop ce qui l'attendait mais il ne s'imaginait pas qu'il était possible de faire autrement que Nick le rejette. Cette crainte d'être mis au ban de sa vie lui pesait énormément. Il ne pouvait pas accepter l'idée que la vérité finirait par le séparer de ses deux frères. Lui qui les adorait et se projetait totalement avec eux. D'un autre côté, il restait un éternel optimiste, le genre de garçon positif, même quand tout s'emballait et que ça devenait un cataclysme. Au point de ne pas être affecté ? Hélas non... véritable éponge à émotion, Gabriel se retrouvait souvent à encaisser les choses et à les retourner au fond de lui, pendant des jours, voire des mois. Et personne n'arrivait vraiment à comprendre tout ce qu'il ressentait, jusqu'à ce que ça ne filtre. Etait-ce parce qu'il était désespéré que Nick se montra aussi doux ? Il avait une façon de réagir qui sur le moment surprit Gabi. Il prenait plutôt bien leur lien de parenté ! L'espace d'un instant il sentit l'espoir naître en lui. Enfin ce secret était connu et tout ce qu'il s'était imaginé comme réaction n'arrivait pas ! Mieux, Nick l'acceptait ! Ca allait permettre de franchir un nouveau cap ! Il allait lui sauter au cou lorsqu'il continua.

Douche froide. Il fut même sidéré par ce qu'il se produisait. Nick lui fit d'abord part du fait qu'il vivait une grande première, il les désignait toujours comme des amis. Et puis, Gabriel comprit alors de quoi il était question. Cela le glaça d'effroi. Il déglutit difficilement sa salive. L'idée que Nick puisse penser qu'il ait une attirance pour lui... il eut la nausée. Pas parce qu'il était moche, loin de là ! Objectivement, Gabriel étant très ouvert d'esprit et attiré autant par les hommes et les femmes, il aurait connu Nick sans lien de parenté, il l'aurait probablement regardé avec une tendresse empreinte de crush. Le professeur avait quand même de beaux atouts pour lui et une capacité à charmer sans trop le vouloir. Sauf que voilà, ils étaient frères. A moitié, certes, car ils n'avaient que le même père. Cela suffisait à bannir tout début d'idée de séduction ou d'attirance pour Gabriel ! Silencieux, il se mit à réfléchir. Evidemment que Nick n'avait pas lu la vérité dans le journal... surement quelques passages qui sortis du contexte global ne lui permirent pas de découvrir la vérité. Il se rendit compte de ses deux choix possibles... soit il disait la vérité et provoquerait sûrement l'ire, compréhensible, de Nick. Soit il jouait le jeu et s'enfonçait dans son mensonge...

- Nick... je...

Que se passerait-il si jamais Nick le rejetait ? Il avait certes vécu tout sa vie jusqu'à maintenant, sans leur présence. Mais il ne serait pas honnête avec lui-même s'il disait qu'il avait été heureux. Depuis tout petit, il rêvait d'avoir des frères. La vie faisait qu'il était possible d'exaucer son voeu. Il aurait bien aimé un conseil de quelqu'un d'avisé... Comme dans l'émission où l'on pouvait gagner des millions, avec l'appel à une amie...

- Ce qui compte le plus pour moi, c'est notre amitié... et... je ne veux pas la perdre... Isaac et toi, vous n'avez pas idée du bien que ça me faire de vous avoir dans ma vie. De la chance que j'ai... Il y a des choses que j'écris, sur mon journal et que... enfin, tu sais, c'est un journal... je ne suis pas sensé le perdre... J'y exprime ce qui me passe par la tête pour ne pas oublier.

Il refusait d'avouer un mensonge et de dire qu'il éprouvait des sentiments pour ses deux frères. C'était faux et il se rendait compte que cela ne ferait qu'aggraver la situation le jour où il leur dirait la vérité. Gabriel laissa échapper un soupir.

- Ce qui me rendrait infiniment triste, c'est que je ne puisse plus vous voir, lui et toi... que nous ne soyons plus amis. Ca, ça me ferait souffrir... parce que ça compte beaucoup pour moi. Vous êtes mes points de repère à New York, mes...

Le mot "grand-frères" buta dans sa bouche. Le dire risquait de déclencher un immense cataclysme... il hésita et finit par dire :

- Mes guides... mes mentors ? Tu vois ce que je veux dire ? Alors... oui... je préfère mille fois notre amitié à... ce que j'ai écrit dans ce journal...